Idéelles et performation
Je nomme idéelles les
situations propices à la production, à l’appropriation et à la reformulation d’idées
qui portent en elles des vertus mobilisatrices et performatives. Les idéelles
présentent des configurations variées, elles peuvent être produites à partir de
programmes de recherche, d’expérimentations ou de débats publics. Dans le
prolongement des réflexions sur l’action créative développées dans le programme
de recherche « La Fabrique du social » (www.lafabriquedusoscial.fr), je
souhaite ici interroger les processus de formation d’idées performatives, leur
diffusion et appropriation, et les effets de transformation qu’elles
produisent. La performativité d’une idée peut être définie comme la capacité (d’un
terme, d’une expression, d’une théorie) à produire une action. Etudiant
la performativité des sciences économiques Michel CALLON et Fabian MUNIESA
(MUNIESA, CALLON, 2008) soulignent que « la
performation est à la fois théorique et expérimentale, psychogène et matérielle,
distribuée et planifiée, restreinte et élargie, à l’image des agencements qu’elle
contribue à instaurer ». Bref, tout un programme !
Je définis ce travail
de recherche à partir d’un point de vue empirique et pragmatique qui vise à
construire les fondements d’une sociologie de l’action créative.
Empirique, cette
recherche trouve ses fondements et sa légitimité dans le travail de terrain.
Guidés par une définition initiale d’une orientation générale, voire d’une
intuition forgée par l’expérience et l’expérimentation, la collecte et le
traitement de divers matériaux constituent le socle à partir duquel, il est
possible d’élaborer des schémas explicatifs ou compréhensifs ancrés dans la
lecture méthodique et systématique des matériaux. Ensuite, et par effort
progressif de généralisation et de modélisation, il est possible de procéder à
une confrontation critique de résultats et d’interprétations constitués sur d’autres
terrains et avec d’autres approches méthodologiques.
Pragmatique, cette
recherche accorde une importance centrale à la production de connaissances dans
l’action et pour l’action. Cette attention à la créativité de l’agir (JOAS,
1999) et aux situations propices à la construction de pratiques réflexives ne
signifie pas la mise en cause d’autres formes d’analyse : celles de la
rationalité téléologique ou axiologique ; du contexte (socioéconomique,
socioculturel, sociopolitique) ; des rapports de pouvoir et des rapports au savoir. Ces différents points de
vue sont articulés afin de constituer des repères d’analyse des actions
observables, des discours portés par les acteurs, des effets de leurs
engagements et réalisations.
Je ne suis pas adepte d’une
sociologie nombriliste qui scrute l’individu, les bruissements de ses comportements
ou encore l’examen d’une partie de son corps considérée comme révélatrice de
changements plus généraux (KAUFMAN, 2013). Je ne suis pas en mesure non plus,
de bâtir une approche globale et holistique sur les mouvements de la société,
voire son effacement (TOURAINE, 2013).
Je situe mon travail au
niveau de la construction des rapports sociaux qui naissent de la rencontre
entre l’individu et la société ou plus précisément à l'échelle des mobilisations
collectives productrices de transformation sociale par l’engagement et la réflexion
partagée. Initiative, dynamique, mouvement, engagement sont les termes retenus
pour qualifier les processus créatifs mis en œuvre par des acteurs qui s’accordent
pour mutualiser des ressources, apprendre et entreprendre collectivement.
A suivre…
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